La Chine promeut sa propre norme pour gagner en « maîtrise »


Le sort d’Internet commence à tourner à l’affrontement entre les Etats-Unis et la Chine au sein de l’Union internationale des télécommunications (UIT), une des agences des Nations unies (ONU). « L’UIT a été dirigée pendant des années par un ressortissant chinois [Houlin Zhao, secrétaire général de 2015 à 2022] et, ainsi, l’influence de la Chine reste notable », relève Brunessen Bertrand, chercheuse et professeure à l’université Rennes-I. Avec plus de 1 milliard d’internautes, un record du monde, l’empire du Milieu veut peser dans les orientations futures du « réseau des réseaux ».

A l’UIT, où l’Américaine Doreen Bogdan-Martin a succédé, en janvier, à Houlin Zhao au poste stratégique de secrétaire général, la Chine est plus en phase avec l’ONU. Celle-ci prône une gouvernance « tripartite » (gouvernements, secteur privé et société civile), où les Etats auraient davantage la main sur « leur » Internet qu’actuellement. L’un des défis technologiques réside dans le protocole d’adressage IPv6 (Internet Protocol Version 6), qui permet de connecter encore plus de terminaux et d’objets à Internet. Problème : l’ancien IPv4, toujours dominant dans le monde, est saturé depuis novembre 2019 – limité à 4,3 milliards d’adresses Internet à 32 bits. D’où l’impératif de migrer tout Internet vers le protocole IPv6 aux adresses à 128 bits, qui est 4 milliards de fois plus grand que l’IPv4.

Peser face à Washington

C’est là que Pékin veut peser face à Washington. La Chine veut être « 100 % IPv6 » en 2030 et milite avec d’autres Etats (notamment africains et moyen-orientaux) pour une évolution vers son IPv6 Enhanced (IPv6 +), afin de mieux « maîtriser » le futur réseau Internet. De là à tisser sa « nouvelle route de la soie » numérique à travers la planète, il n’y a un qu’un pas, ou plutôt un « Grand Bond en avant ».

Mis au point depuis trente ans par l’Internet Engineering Task Force (IETF), le groupe de travail de l’ingénierie d’Internet au sein de l’Internet Architecture Board (IAB), l’IPv6 doit évoluer pour faire face aux défis technologiques que posent les milliards de connexions mobiles (4G-5G et, bientôt, 6G), le très haut débit, l’intelligence artificielle, les objets connectés ou encore les cyberattaques. L’UIT travaille étroitement avec l’IETF.

Le fabricant de télécoms chinois Huawei – dans le collimateur de Washington – y fait la promotion de l’IPv6 +, depuis que la firme de Shenzhen est devenue, en avril 2020, membre de l’IETF. La Chine veut faire ainsi contrepoids aux Etats-Unis, l’IETF-IAB étant placé sous la coupe de l’Internet Society, basée à Reston, dans l’Etat de Virginie.

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